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Le Suffren, premier des six nouveaux sous-marins nucléaires d’attaque (SNA) du type Barracuda destinés à la Marine nationale, va connaitre ce jeudi sa première prise de commandement avec un équipage constitué. Il a quitté cette semaine le hall de construction du chantier Naval Group de Cherbourg pour rejoindre le dispositif de mise à l’eau (DME) de la base navale. Un lent transit de deux jours effectué au moyen de 24 marcheurs, qui ont déplacé l’imposante coque de 99 mètres de long pour 8.8 mètres de diamètre à la vitesse de 30 mètres par heure. C’est une première depuis Le Terrible, quatrième sous-marin nucléaire lanceur d’engins (SNLE) du type Le Triomphant, qui avait réalisé la même opération en 2008.

 

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© NAVAL GROUP - EWAN LEBOURDAIS

(© NAVAL GROUP - EWAN LEBOURDAIS)

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© NAVAL GROUP - EWAN LEBOURDAIS

(© NAVAL GROUP - EWAN LEBOURDAIS)

 

Une cérémonie présidée par Emmanuel Macron

Peut-être drapé dans un grand drapeau tricolore à l’image du Charles de Gaulle pour sa mise à l’eau en mai 1994 (il y aura « quelque chose de spécial » pour le dévoilement du sous-marin mais on ne sait pas quoi), le Suffren fera l’objet vendredi 12 juillet d’une grande cérémonie de lancement. Même si le bateau ne sera mis à l’eau que plus tard dans le mois, c’est le moment traditionnel du placement sur le DME qui a été choisi pour l’inauguration officielle. Celle-ci sera présidée par Emmanuel Macron, le chef de l’Etat étant notamment accompagné de Florence Parly, ministre des Armées. Une présence des plus hautes autorités de l’Etat qui témoigne de l’importance accordée à ce programme stratégique pour la Marine nationale et surtout la défense de la France.

Un programme à plus de 9 milliards d’euros pour des bateaux hors normes

Initié en 1998 et notifié en 2006, le programme Barracuda, qui vise à remplacer les six SNA de première génération du type Rubis mis en service entre 1983 et 1993, représente un investissement annoncé aujourd’hui à 9.1 milliards d’euros. Un coût comprenant le développement, la construction et les approvisionnements long terme (pièces de rechanges notamment) du Suffren et de ses cinq sisterships. Des bâtiments hors normes du fait de leur complexité, chacun étant notamment constitué dans 700.000 pièces, 70.000 équipements, 20 kilomètres de tuyauterie ou encore 150 kilomètres de câbles. Le tout dans un espace réduit comprenant entre autres une chaufferie nucléaire qui, à elle seule, pèse 400 tonnes. Ce réacteur est une évolution de la famille K15 déjà embarquée sur les SNLE du type Le Triomphant  ainsi que sur le porte-avions Charles de Gaulle.

Nouveaux senseurs et armements

Au-delà du tour de force technique pour les concevoir et les réaliser, savoir-faire dont seules quelques nations dans le monde sont capables de manière autonome et souveraine, ces SNA fortement digitalisés s’annoncent aussi exceptionnels en termes de capacités militaires. Ils vont bénéficier d’une nouvelle génération de senseurs, en particulier dans le domaine des sonars, ainsi que d’armements nouveaux, dont la torpille lourde F21 et la version à changement de milieu du missile de croisière naval (MdCN). Sans oublier, pour la première fois sur un sous-marin français, la possibilité d’embarquer sur le dos des Barracuda, derrière le kiosque, un hangar abritant le matériel des nageurs de combat, dont le nouveau mini-sous-marin PSM3G des commandos marine.

Plus grands que les Rubis, mais aussi plus rapides, plus discrets, capables de plonger plus profondément et dotés de capacités acoustiques et militaires sensiblement accrues, les Barracuda vont apporter à la flotte française de nouveaux standards opérationnels. Ils sont destinés à chasser des sous-marins adverses, participer à la sanctuarisation des zones où évoluent les SNLE lors de leurs départs et retours de patrouilles,  escorter des unités précieuses comme le Charles de Gaulle, conduire des frappes en profondeur sur des objectifs terrestres grâce au MdCN, effectuer des missions de renseignement et servir de base à des opérations spéciales impliquant des nageurs de combat.

50 millions d’heures de travail et 800 entreprises impliquées

Ce programme majeur a déjà impliqué plus de 10.000 personnes chez les industriels et services étatiques impliqués, à commencer par Naval Group, Technicatome, la DGA et le CEA. Avec à la clé 50 millions d’heures de travail auxquelles s’ajoutent 20 millions d’heures supplémentaires pour les fournisseurs de composants, quelques 800 entreprises françaises réparties sur tout le territoire national contribuant au programme.

108ème sous-marin produit à Cherbourg en 120 ans

108ème sous-marins réalisé à Cherbourg depuis 1899, où 16 bâtiments à propulsion nucléaire ont déjà vu le jour (six type Le Redoutable, six Rubis et quatre Le Triomphant), le Suffren, dont la première tôle a été découpée en 2007, sera mis à l’eau d’ici la fin du mois. Des tests à flot débuteront alors en vue du chargement du réacteur nucléaire en septembre et de sa divergence entre novembre et décembre.

Livraison prévue à l’été 2020

Cela permettra de débuter les essais à la mer au premier trimestre 2020. D’abord au large de Cherbourg, en surface, puis à Brest au printemps pour les essais de plateforme et ensuite depuis Toulon, où les SNA sont basés, pour la partie système de combat. Si tout se passe comme prévu, la Direction Générale de l’Armement prévoit de réceptionner le bâtiment à l’été 2020. Elle le transfèrera alors à la Marine nationale qui poursuivra la validation des capacités militaires de son nouveau SNA qui, à l’issue de dernières mises au point et d’un déploiement de longue durée, sera admis au service actif. Aucune date n’est encore avancée pour cette ASA.

Premier équipage constitué

Alors que les premiers sous-mariniers du Suffren s’entrainent depuis trois ans sur des simulateurs, pour mener à bien les essais un premier équipage est officiellement constitué ce jeudi. Un équipage d’armement trié sur le volet, avec des personnels de grande expérience de la Marine nationale. A leur tête, le capitaine de frégate Axel Roche, qui a précédemment commandé les SNA Rubis et Saphir.

 

SNA Suffren : première prise de commandement et inauguration présidentielle > Diaporamas intégrés

 

Quand le Suffren sera opérationnel, son équipage comprendra 63 marins (avec la possibilité de le féminiser), auxquels s’ajouteront deux analystes du Centre d'Interprétation, de Reconnaissance et d'Analyse (CIRA), les fameuses « oreilles d’or » de la Marine nationale. Plus nombreux, l’équipage d’armement comprend 90 marins du fait que les essais constituent une période très dense et éprouvante nécessitant de prévoir un roulement des personnels pour éviter une trop grande fatigue. Des équipes des industriels et de la DGA s’ajouteront aux marins pour les essais.

Quatre Barracuda doivent être livrés d’ici la fin 2025

Pour la suite, les sisterships du Suffren sont pour quatre d’entre eux déjà en construction. Les futurs Duguay-Trouin, Tourville et De Grasse doivent être livrés d’ici la fin 2025, le Rubis suivant en 2027. Quant au dernier SNA du type Barracuda, dont l’entrée en flotte est prévue en 2029, sa commande doit intervenir d’ici la fin de l’année.

Ces nouveaux sous-marins remplaceront progressivement leurs aînés, dont un premier exemplaire, le Saphir (1984), a rejoint Cherbourg début juillet en vue d’y être désarmé. Le prochain à prendre sa retraite sera le Rubis (1983), attendu en décembre 2020 à la pointe du Cotentin. Puis suivront au fil de la livraison des Barracuda les quatre derniers SNA de première génération : Casabianca (1987), Emeraude (1988), Améthyste (1992) et Perle (1993).

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